L’industrie des semi-conducteurs se prépare à une nouvelle avancée technologique majeure. Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC), le plus grand fabricant de puces au monde, a confirmé que sa technologie de 2 nanomètres (N2) sera prête pour la production en volume dès le quatrième trimestre 2025, avec des clients prestigieux tels qu’Apple, AMD, Qualcomm, Broadcom, Intel et MediaTek déjà engagés pour sécuriser leur capacité dans ce nœud stratégique.
Ce progrès représente un tournant non seulement par la complexité technique du procédé, mais également par son importance économique et géopolitique, à un moment où les puces d’intelligence artificielle (IA) et de calcul haute performance (HPC) deviennent des actifs cruciaux à l’échelle mondiale.
Production en 2025 et clients clés
Selon les informations publiées par Digitimes, TSMC respectera son calendrier et lancera la fabrication en masse en 2 nm avant la fin 2025. La demande initiale est dominée par Apple, qui s’assure environ 50 % de la capacité disponible sur ce nœud, consolidant ainsi sa position de client prioritaire pour la fondeuse taïwanaise.
Suivent Qualcomm — avec ses processeurs Snapdragon pour mobiles et PC —, AMD pour ses CPU et GPU, Intel dans le cadre de sa stratégie IDM 2.0, ainsi que Broadcom et MediaTek.
Pour 2026, la production devrait connaître une forte accélération, et d’autres géants comme NVIDIA, Amazon (Annapurna Labs), Google, Marvell et Bitmain rejoindront la course, parmi plus d’une dizaine de sociétés influentes.
La course pour sécuriser la capacité
Le coût d’entrée dans le nœud de 2 nanomètres est élevé : 30 000 dollars par wafer, record dans l’industrie. Néanmoins, les fabricants n’ont pas reculé ; au contraire, ils ont accéléré leurs commandes, conscients de la capacité limitée de TSMC et du risque de voir leur concurrence prendre le dessus en cas de retard ou de pénurie.
La crainte de manquer d’accès aux wafers a incité plusieurs clients à réserver leur production plusieurs années à l’avance, une pratique déjà courante pour les nœuds de 5 et 3 nm, qui s’intensifie avec les 2 nm en raison de la forte demande en IA et HPC.
Expansion à Taïwan, en Arizona et au-delà
Pour faire face à cette pression, TSMC intensifie ses capacités. Ses usines de Hsinchu Baoshan (Fab 20) et Kaohsiung (Fab 22) seront les principaux centres de production en 2 nm à Taïwan.
- Fin 2025, ces deux sites atteindront une capacité combinée de 45 000 à 50 000 wafers par mois.
- En 2026, ce chiffre dépassera 100 000 wafers par mois.
- Pour 2028, avec l’entrée en service de la seconde phase de la fab d’Arizona (Fab 21 P2) et du futur Fab 23 P3 aux États-Unis, la production de 2 nm pourrait atteindre 200 000 wafers par mois.
Ce déploiement confirme la stratégie de TSMC de diversifier ses sites de production pour réduire les risques liés aux tensions géopolitiques au détroit de Taiwan. Déjà, un 30 % de la capacité en 2 nm sera déployé aux États-Unis, principalement en Arizona.
Pressions et défis externes
Malgré sa position dominante, TSMC doit faire face à des défis. Samsung Electronics et la japonaise Rapidus tentent de se positionner comme alternatives sur les nœuds avancés, mais leur impact sur les commandes TSMC reste limité jusqu’à présent.
Par ailleurs, l’entreprise doit composer avec plusieurs enjeux économiques et politiques :
- Volatilité des taux de change et tarifs douaniers internationaux.
- Coûts de production en hausse, notamment pour ses nouvelles usines hors de Taïwan.
- Interventionnisme américain incluant subventions, rumeurs de participation dans Intel, ou influence sur l’écosystème des semi-conducteurs.
En dépit de ces tensions, TSMC a revu à la hausse ses prévisions de revenus en dollars pour 2025, passant d’une croissance estimée de 25 % à 30 %, principalement portée par la demande accrue en puces pour IA et HPC.
Feuille de route : N2P, A16 et A14
Le nœud N2 ne représente pas la fin du progrès. La société a précisé sa vision pour l’avenir :
- N2P, une version améliorée en 2 nm, débutera à la seconde moitié de 2026.
- A16, un nœud avancé arborant une architecture « Angstrom », sera également lancé en 2026.
- A14, prévu pour 2028, sera initialement produit sur la Fab 25 de Taichung, déjà en construction.
Ces innovations marqueront la transition vers des technologies sous les 2 nm, où TSMC vise à conserver sa position de leader face à Samsung et aux futurs développements d’Intel.
Les 4 et 3 nm, encore essentiels
Bien que les 2 nm gravitent au sommet de l’actualité, les nœuds de 4 et 3 nm resteront essentiels jusqu’au moins 2026, notamment pour Nvidia qui prévoit de produire ses futures GPU Rubin en 3 nm, un nœud jugé « à forte rentabilité » par TSMC en raison des prix élevés de ses wafers et de la forte demande.
En réalité, TSMC indique que ses lignes de production en 5, 4 et 3 nm sont pleinement sollicitées, avec aucune capacité disponible jusqu’à la fin de 2026, traduisant l’intensité de la demande actuelle.
Les États-Unis, un pilier dans la redistribution de la capacité
La croissance en Arizona s’inscrit dans une stratégie plus large de répartition mondiale de la production. Alors que les nœuds en 2 nm seront deployés aux États-Unis, TSMC prévoit qu’au moins 30 % de sa capacité totale en 2 nm sera externalisée à l’international, notamment pour réduire sa dépendance à l’Asie face aux tensions croissantes avec la Chine et à la rivalité technologique.
Impacts sur le marché et projections
Le lancement des 2 nm ne se limite pas à une avancée technique : il redessinera la compétition mondiale dans le secteur des semi-conducteurs. Avec un nœud qui promet des performances accrues et une meilleure efficacité énergétique, les fabricants pourront concevoir des processeurs plus puissants et plus économes en énergie, cruciaux pour tout, des smartphones aux datacenters IA.
Ce changement influencera aussi la part des revenus de TSMC, qui tire déjà 75 % de ses ventes auprès de clients américains. Avec l’arrivée des 2 nm, cette proportion pourrait dépasser 80 %, renforçant la domination mondiale des géants de la Silicon Valley.
Conclusion
Le déploiement de la technologie 2 nm de TSMC confirme que l’industrie des semi-conducteurs traverse une étape sans précédent, marquée par l’IA, la géopolitique et l’innovation. Avec Apple en client principal et un écosystème de plus en plus dépendant de sa capacité, TSMC se positionne pour maintenir son leadership mondial face à la concurrence encore fragile mais ambitieuse.
Les dix prochaines années seront déterminantes, non seulement pour le design des puces, mais aussi pour la maîtrise des capacités de production dans ces nœuds stratégiques. Et dans ce domaine, TSMC conserve son avantage.
Questions fréquentes (FAQ)
1. Quels sont les avantages des puces de 2 nm par rapport à celles de 3 ou 5 nm ?
Les 2 nm offrent une densité de transistors plus élevée, une meilleure efficacité énergétique et une performance accrue, permettant des processeurs plus rapides avec une consommation électrique réduite.
2. Pourquoi Apple est-il le principal client de TSMC pour le 2 nm ?
Apple commande environ 50 % de cette capacité car elle dépend des nœuds les plus avancés pour différencier ses produits, notamment ses iPhone et Mac équipés de processeurs Apple Silicon.
3. Quel sera le rôle des usines américaines dans cette stratégie ?
Les usines d’Arizona pourraient produire jusqu’à 30 % de la capacité totale en 2 nm de TSMC, en réponse aux demandes du gouvernement américain pour assurer un approvisionnement local.
4. Les nœuds de 4 et 3 nm resteront-ils pertinents avec l’arrivée du 2 nm ?
Oui. Bien que le 2 nm soit à la pointe, les nœuds de 4 et 3 nm continueront d’être massivement utilisés jusqu’en 2026, en raison de la forte demande pour des GPU, CPU et puces IA dans ces processus.
source : digitimes.com.tw