L’industrie de l’assurance habitation vient de faire un pas que plusieurs n’attendaient que de voir depuis des années. L’initiative openIDL, soutenue par la Linux Foundation, a lancé le standard openIDS Homeowners v.1.0, la première norme de données d’assurance libre, ouverte et prête pour la production. Un modèle commun qui vise à devenir le “langage partagé” entre assureurs, régulateurs, insurtechs et fournisseurs technologiques.
Ce lancement a été annoncé le 20 novembre 2025 depuis San Francisco et marque, selon l’organisation elle-même, un “signe marquant” pour moderniser la façon dont les données relatives aux risques et aux polices d’assurance habitation sont collectées, échangées et rapportées dans tout l’écosystème.
Qu’est-ce que le standard openIDS Homeowners v.1.0 ?
Le standard openIDS Homeowners v.1.0 constitue le premier modèle de données au sein de la famille open Insurance Data Standards (openIDS). Il est spécifiquement conçu pour le secteur de l’assurance habitation et des propriétés, et définit une manière cohérente de décrire :
- les caractéristiques du risque (maison, localisation, matériaux, usage),
- les couvertures et conditions des polices,
- les objets assurables associés,
- et un ensemble de listes de codes et de références communes.
En pratique, il s’agit d’un modèle de référence de données : un schéma indiquant quels champs doit contenir une police d’assurance habitation, comment les nommer, quels sont les valeurs valides, et comment échanger ces données entre systèmes. Tout cela est orienté vers une utilisation concrète en production, pas seulement pour des tests en laboratoire.
Ce standard a été développé au sein du groupe de travail openIDS Data Standards Working Group (DSWG), plus précisément dans le Homeowners Workstream, où participent des assureurs, insurtechs, vendors et experts en régulation.
Moins de friction, plus de conformité et davantage d’innovation
Le manque de standards communs dans le secteur des non-vie, et tout particulièrement en habitation, a généré un coût élevé pendant des décennies. Chaque entreprise définit ses propres formats, chaque régulateur demande des données selon ses critères, et chaque intégration technologique nécessite des mappages sur mesure.
Selon openIDL, les objectifs du standard sont clairs :
- Réduire la friction lors du reporting : un format commun simplifie les envois périodiques aux superviseurs et aux bureaux statistiques.
- Améliorer la conformité réglementaire : avec des données structurées et cohérentes, les assureurs peuvent répondre plus rapidement et à moindre coût aux nouvelles exigences réglementaires.
- Faciliter l’interopérabilité : lorsque tous parlent le même langage de données, intégrer un nouveau fournisseur technologique ou partager des informations avec un partenaire n’est plus un projet traumatique.
- Favoriser l’analyse avancée : des données propres et normalisées constituent la base de modèles de risque précis, de tableaux de bord opérationnels améliorés et de produits mieux adaptés à chaque profil.
Selon Josh Hershman, directeur général d’openIDL, ce lancement est “un témoignage du pouvoir de la collaboration” et d’un « design » “dynamique, résilient et tourné vers l’avenir”, soutenu par la gouvernance ouverte de la Linux Foundation.
Une réponse à un besoin historique de l’assurance habitation
Les réactions des membres d’openIDL soulignent à quel point le secteur en réclamait une telle initiative depuis longtemps.
Pour Michael Payne, vice-président des services actuariels et Chief Pricing Actuary chez AAIS, le nouveau standard “répond à un besoin de longue date” sur le marché, en proposant pour la première fois un modèle prêt pour la production qui combine efficacité, conformité et potentiel d’adoption massive.
Du point de vue technologique, Robert Clark, fondateur et PDG de Cloverleaf Analytics, indique qu’une partie du know-how intégré au standard provient de propriété intellectuelle que la société a contribué après une décennie d’utilisation éprouvée dans le réel. Selon lui, cette base permet de déployer un standard “viable commercialement” dès le premier jour.
Et Cory Isaacson, PDG de reThought Flood, rappelle que ce n’est là que la première étape. Le standard pour l’habitation pose “une base solide sur laquelle construire” d’autres modèles, avec le potentiel de générer des économies de milliards en efficacité et en simplification des processus tout au long de la chaîne de valeur de l’assurance.
De l’assurance habitation à d’autres branches et cas d’usage
Le Homeowners Standard v.1.0 n’est que le premier modèle d’une feuille de route plus large. L’objectif d’openIDL est d’étendre la famille openIDS à d’autres lignes de métier — par exemple, automobiles, commerce, risques catastrophiques ou même vie et santé — ainsi qu’à différents besoins réglementaires.
Voici la démarche :
- Commencer par le segment habitation, où le problème de données dispersées est particulièrement évident : sources multiples, critères d’adhésion variés et pression réglementaire croissante liée au changement climatique et aux risques catastrophiques.
- Consolider des pratiques communes : comment décrire une résidence, une police d’assurance, un sinistre ou une exposition au risque.
- Étendre progressivement ces standards à d’autres types de produits et localisations, en respectant la philosophie des standards ouverts, sans licences payantes, et avec une gouvernance communautaire.
Parallèlement, openIDL propose également des Normes de Base et des listes de codes qui servent de colonne vertébrale à tous ces modèles, évitant ainsi les contradictions entre branches et favorisant une vision plus intégrée du client et du risque.
Avantages pour les assureurs, régulateurs et consommateurs
Bien que cela semble technique, la standardisation des données a un impact direct sur presque tous les acteurs de l’écosystème :
- Assureurs
Possibilité de simplifier leurs architectures internes, de réduire les projets d’intégration spécifiques, d’améliorer le contrôle qualité de leurs données et de lancer plus rapidement de nouveaux produits basés sur l’analytique avancée. - Régulateurs et superviseurs
Disponibilité d’informations plus homogènes, comparables et rapides à traiter, facilitant la détection des problématiques systémiques, la surveillance de la solvabilité et la formulation de politiques publiques mieux informées. - Fournisseurs technologiques et insurtechs
Travailler avec un standard ouvert réduit les coûts d’intégration auprès de multiples compagnies et ouvre la voie à des solutions réutilisables dans plusieurs marchés sans devoir redéfinir le modèle de données pour chaque projet. - Consommateurs
Bien qu’ils ne le perçoivent pas directement, ils profitent d’offres mieux ajustées au risque réel, d’une plus grande transparence sur les couvertures et prix, ainsi que de processus d’achat et de déclaration de sinistres plus agiles.
En définitive, le message d’openIDL consiste à dire que les données du secteur de l’assurance sont trop importantes pour rester cloisonnées dans des formats propriétaires et des silos internes.
Un standard ouvert sous l’égide de la Linux Foundation
openIDL est un projet de la Linux Foundation dédié à la modernisation des données d’assurance à travers l’adoption de standards ouverts, une gouvernance partagée et une collaboration entre industrie, régulateurs et vendors. La Fondation apporte son modèle de gouvernance ouverte, son infrastructure communautaire et son expérience issue d’autres projets phares comme Linux, Kubernetes, OpenSSF ou RISC-V.
En alignant le standard openIDS avec les principes open source, l’organisation ambitionne de :
- éliminer les dépendances à un fournisseur unique,
- assurer la transparence dans l’évolution des modèles,
- et permettre à tout acteur de l’écosystème — qu’il s’agisse d’une grande compagnie d’assurance, d’une startup ou d’un régulateur régional— de participer à la définition des futures versions.
Avec la publication et la disponibilité du standard openIDS Homeowners v.1.0, le défi consiste désormais à atteindre une masse critique : que suffisamment d’assureurs et de partenaires technologiques l’intègrent dans leurs systèmes pour que le standard devienne une véritable référence dans l’échange de données en assurance habitation.
Questions fréquentes sur le standard openIDS Homeowners v.1.0
Quels problèmes conçoit-il précisément de résoudre ?
Il répond à la fragmentation des formats de données en assurance habitation. Aujourd’hui, chaque assureur et régulateur utilise des modèles différents, ce qui engendre des coûts importants pour la traduction, l’intégration et le reporting. Ce standard propose un modèle commun, ouvert et prêt pour la production permettant de décrire risques, polices et objets assurables.
Qui peut utiliser ce standard de données ?
Il est accessible à tous : assureurs, régulateurs, insurtechs, fournisseurs de logiciels et d’analytique, ainsi que toute organisation traitant de données de risque et de polices. Son accès est libre, sans licence propriétaire, et la documentation est disponible en accès public.
Est-ce obligatoire d’adopter le standard openIDS dans le secteur ?
Non. Il s’agit d’un standard volontaire, porté par l’industrie sous l’égide de la Linux Foundation. Sa réussite dépendra de l’adoption réelle par les assureurs, régulateurs et fournisseurs. Plus il sera adopté par les acteurs, plus l’interopérabilité et l’efficacité collective progressent.
Quelles sont les perspectives après ce standard pour l’assurance habitation ?
openIDL et ses groupes de travail travaillent déjà sur d’autres modèles pour différentes lignes de produits et cas d’usage. L’objectif est de construire une famille de standards ouverts couvrant une large partie des besoins en données du secteur, depuis le reporting réglementaire jusqu’à l’analytique avancée et l’innovation produits.
Source : linuxfoundation et OpenIDS Standards