La stratégie américaine en matière de semi-conducteurs connaît un tournant décisif : Donald Trump a confirmé que les GPU de dernière génération de NVIDIA sous l’architecture Blackwell ne seront pas exportés en Chine. Lors d’une déclaration récente, le président a été clair — « nous ne les donnerons pas à d’autres » — ce qui annule pratiquement toute possibilité de levée du veto et marque le retour à une ligne dure, avec des exceptions pour des alliés stratégiques en Asie, comme la Corée du Sud.
Ce changement de cap fait suite à plusieurs semaines de signaux contradictoires. D’un côté, il a été filtré que des hauts responsables de son administration avaient bloqué des initiatives d’exportation vers la Chine ; de l’autre, le président laissait entendre qu’une ouverture partielle en faveur de versions “régulées” pourrait être envisagée. Au final, cela signifie un refus total pour la Chine concernant la famille Grace Blackwell (fabriquée en 4NP de TSMC, couplée à NVLink 5 et alimentée par HBM3e), tout en maintenant une option favorable pour les pays alliés dans le cadre d’accords bilatéraux spécifiques.
Cette décision confirme la lecture géopolitique que Washington impose à la technologie de l’Intelligence Artificielle : les puces les plus avancées sont désormais des actifs stratégiques, dont l’accès est réservé à ceux se trouvant dans le périmètre des intérêts partagés. Sur le plan technologique, cela implique de reconfigurer les chaînes d’approvisionnement en IA, de revoir les feuilles de route des fournisseurs, et surtout, de forcer la Chine à mieux s’appuyer sur son écosystème national.
Que dit exactement Trump (et quelles implications concrètes ?)
Lors d’une intervention publique, le président a clairement affirmé que les puces NVIDIA Blackwell ne seront pas contrôlées par une entité étrangère à l’Amérique. La phrase — « nous ne les donnerons pas à d’autres » — est perçue comme un veto explicite à la Chine, empêchant toute tentative future de relâcher le contrôle sur Blackwell. Des sources proches du dossier indiquent également que des responsables de l’administration avaient déjà freiné des projets d’exportation en amont.
Concrètement :
- Blackwell (incluant la Grace Blackwell qui combine CPU Arm “Grace” et GPU Blackwell) ne sera pas accessible en Chine.
- Le veto concerne tant l’entraînement que l’inférence avec des longues fenêtres de contexte et des charges token-intensives, où la latence et le bande passante de HBM3e et NVLink 5 jouent un rôle decisive.
- Les alliés asiatiques reçoivent des unités : la Corée du Sud a ainsi signé un commandement > 260 000 GPU Blackwell pour sa usine d’IA nationale, impliquant des grandes entreprises locales dans des domaines comme les semi-conducteurs, le cloud, ou l’automobile.
- Le reste du monde
étant placé dans une zone intermédiaire : accès réservé pour certains partenaires privilégiés selon des accords précis ; restrictions pour d’autres marchés où Washington craint un transfert technologique.
Ce mouvement s’inscrit dans une stratégie nationale de sécurité qui privilégie la domination dans les semi-conducteurs avancés face à des puissances rivales. Il s’inscrit aussi dans la logique de préserver le leadership en IA comme une véritable question d’État.
L’impact sur NVIDIA : entre domination mondiale et vide chinois
Pour NVIDIA, cette décision est ambiguë. D’un côté, elle confirme leur rôle de leader dans l’écosystème mondial de l’IA : Blackwell est aujourd’hui le standard de facto pour les modèles de pointe utilisés dans les hiperscalers et laboratoires. Les commandes de partenaires comme la Corée du Sud ou des consortiums occidentaux fluent. De l’autre, cela ferme de nouveau le marché chinois.
- Chutes de revenus “perdus” : Jensen Huang, PDG de NVIDIA, a reconnu qu’en un trimestre, la part de marché en Chine pouvait passer du 90 % au 0 % en raison des interdictions internes à Pékin sur l’usage de technologies américaines et des normes de contrôle à Washington. Le veto Blackwell renforce cette vacance.
- Un horizon “allié” : les importants commandes sud-coréennes et celles d’autres partenaires occidentaux compensent en partie l’absence chinoise, mais pas complètement : la Chine ne se contente pas d’acheter, elle construit un écosystème (centres de données, modèles, services), ce qui entraîne une demande supplémentaire pour les composants complémentaires (stockage, réseaux, logiciels) qui migrent vers des fournisseurs locaux.
- Stratégie produit : les versions “régulées” destinées à l’export, expérimentées avec Hopper H20, ne semblent pas applicables pour Blackwell en Chine. Cela complique une approche “à moitié voie” et laisse NVIDIA avec deux mondes séparés : des performances maximales pour les alliés, et zéro pour Pékin.
Sur la Bourse, cette posture politique soutient l’idée que la croissance de l’IA restera concentrée dans des blocs alignés avec les États-Unis, et que la demande occidentale (et celle de ses alliés) continuera de supérer l’offre d’accélérateurs jusqu’à la fin de 2026-2027. Mais, le coût d’opter pour “pas de Chine” restera élevé.
La Chine : accélération forcée vers un “Plan B” domestique
Pour la Chine, le rejet de Blackwell constitue un facteur supplémentaire pour accélérer le développement de son propre silicium et de son écosystème interne :
- Accélérateurs locaux : des roadmaps comme Ascend (Huawei) ou des designs de startups locales seront favorisés, avec une focalisation sur l’inférence et le déploiement dans des plateformes nationales.
- Stack logicielle : remplacement de CUDA par des runtimes locaux, des compilateurs maison et des bibliothèques compatibles, bien que cette transition soit plus lente que le remplacement matériel.
- Chaîne d’approvisionnement : sans Blackwell et avec des limites sur les H100/H200, Pékin devra favoriser les NAND/DRAM locaux, le packaging et le backend dans sa sphère, tout en réduisant sa dépendance à l’HBM (dominée par SK hynix, Samsung, Micron) et au packaging avancé à Taïwan.
- Risques : une utilisation accrue de sous-produits pourrait diminuer l’efficacité dans les entraînements et inférences de pointe, tout en augmentant le coût total de possession pour les fournisseurs domestiques, et pourrait ralentir des projets nécessitant une latence et une échelle optimales.
Le scénario probable : deux écosystèmes IA de plus en plus distants et avec une interopérabilité limitée, l’un US/alliés et l’autre Chine avec des technologies de remplacement.
TSMC, HBM et l’économie du calcul : le sous-texte technique
Le veto à Blackwell envoie également un message à la chaîne d’approvisionnement :
- TSMC 4NP : les Grace Blackwell sont fabriquées sur un nœud réservé aux clients stars de TSMC. Le veto renforce la priorité de cet investissement pour l’Occident et ses partenaires.
- Mémoire HBM : la filière de l’IA dépend fortement de la HBM (bande passante, latence). SK hynix et Samsung fixent le rythme ; sans Blackwell, les capacités HBM3e et HBM4 seront destinées aux États-Unis et alliés, ce qui exacerbe la tension sur le mix de composants pour la Chine.
- NVLink 5 et réseaux : la connexion à faible latence entre GPU constitue un élément clé pour les modèles avec contextes étendus. Ce réseau (NVLink 5, InfiniBand/NDR, futures lignes) sera un actif stratégique… mais aussi une ressource rare sur les marchés interdits.
Ce contexte laisse entrevoir une décennie où chip, mémoire, interconnexion et énergie seront négociés à la fois dans des salles techniques et dans des diplomaties étatiques.
Les conséquences pour le marché mondial de l’IA (et leur importance)
- Tensions en chaîne : les commandes des alliés absorberont une grande partie de la production de GB200/GB300 ; les cuirasses de HBM et de packaging continueront ; délais et prix resteront tendus.
- Segmentation technologique : la bifurcation de la IA vers deux blocs où la transfert de connaissance et les normes divergeront rapidement.
- Innovation contrôlée : les États-Unis renforcent leur message que la pointe de la technologie IA (chips, modèles, outils) n’est pas neutre, mais sert la politique extérieure.
- Valeur accrue pour les fonderies et la mémoire : TSMC, les fabricants de 3DIC et de modules HBM continueront à capter la majorité de la valeur additionnelle dans le secteur de l’IA.
En définitive, cette évolution montre une décennie où technologie et géopolitique sont inextricablement liées, orchestrant un paysage où l’armée, l’énergie, le computing et le pouvoir politique convergent.
Le « durcisseur » d’Ubuntu qui gagne des adeptes : comment fonctionne le script de Konstruktoïd pour sécuriser les systèmes systemd de haut en bas