L’Espagne souhaite prendre le lead, aux côtés de l’Amérique latine, dans le débat mondial sur les droits des citoyens dans l’univers numérique. Telle a été la déclaration du ministre de la Transformation Numérique et de la Fonction Publique, Óscar López, lors de la présentation du Observatoire des Droits Numériques, organisée dans le cadre du congrès Andicom à Carthagène des Indes.
Cette proposition intervient à un moment stratégique, marqué par l’expansion de l’intelligence artificielle (IA), la désinformation et la montée des préoccupations relatives à la vie privée et à la cybersécurité. « La révolution numérique comporte à la fois des fissures et des opportunités. L’Europe et l’Iberomérique doivent prendre position et faire entendre leur voix », a souligné López.
Un observatoire à vocation internationale
L’Observatoire des Droits Numériques, porté par Red.es et en collaboration avec 19 entités du secteur technologique, académique et social, naît avec un objectif clair : adapter les droits fondamentaux au monde digital. Sa mission est de sensibiliser, diffuser et assurer la mise en œuvre de la Charte des Droits Numériques adoptée en Espagne en 2021, tout en promouvant des politiques publiques et des engagements similaires dans d’autres pays.
Le programme dispose d’un budget de 10,83 millions d’euros, financé à 80 % par les fonds européens NextGenerationEU, mobilisant plus de 150 entités et 360 experts.
Contextes : de l’Espagne à l’UE et à l’Iberomérique
L’Espagne a été pionnière en 2021 en adoptant sa propre Charte des Droits Numériques, un cadre qui reconnaît des droits tels que la vie privée, la protection des données, la liberté d’expression et l’accès à Internet comme des éléments essentiels de la démocratie à l’ère numérique.
Ce parcours a été suivi par l’Union européenne en 2022 avec la Déclaration des droits et principes numériques de l’UE, puis par la Cumbre Iberoamericana de Jefes de Estado y de Gobierno en 2023, où la Charte Iberoaméricaine des Droits Numériques a été adoptée.
Grâce à ce nouvel observatoire, l’Espagne cherche à consolider ce mouvement et à le projeter en direction de l’Amérique latine, une région où les inégalités numériques et la désinformation posent des défis urgents.
La désinformation et l’enfance, parmi les principaux défis
Lors de la rencontre, des experts de divers domaines ont tous convergé sur le fait que la digitalisation, sans approche humaniste, peut reproduire des inégalités et engendrer des risques. Les thèmes abordés comprenaient :
- La désinformation et les fake news, qui menacent la démocratie.
- La protection de l’enfance dans les environnements numériques, de plus en plus exposée à des risques tels que le cyberharcèlement ou l’utilisation abusives des données personnelles.
- La vie privée et la sécurité des données personnelles.
- L’éthique technologique, notamment dans le contexte de l’utilisation de l’intelligence artificielle dans les processus publics et privés.
« Le défi ne réside pas seulement dans la technologie, mais aussi dans le social, le politique et le culturel », a indiqué Carolina Botero, directrice de la Fondation Karisma.
Voix régionales
Événement qui a rassemblé des acteurs clés tels que Jaime Abello, directeur général de la Fondation Gabo, l’ancienne secrétaire d’État à la Numérisation et à l’Intelligence Artificielle Carme Artigas, ainsi que des représentants d’entités colombiennes et d’autres pays ibéro-américains.
Tous ont souligné que les droits numériques constituent l’extension logique des droits humains dans le monde virtuel, et que leur protection est essentielle pour préserver la démocratie et la coexistence au XXIe siècle.
L’Espagne comme pont entre l’Europe et l’Amérique latine
Par cette initiative, le gouvernement espagnol vise à renforcer son rôle de pont entre l’Europe et l’Amérique latine dans le domaine numérique. La stratégie consiste à coordonner les efforts en matière de protection des droits, mais aussi de formation numérique, de coopération technologique et d’incitation à l’innovation.
« Si une révolution ne multiplie pas les droits, ce n’est pas une révolution », a conclu Óscar López, soulignant la nécessité que la numérisation serve à élargir les opportunités des citoyens et non à les restreindre.
Un défi global avec un impact local
La digitalisation représente aujourd’hui un vecteur de croissance économique et sociale, mais aussi un terrain de compétition géopolitique. L’initiative espagnole avec l’Amérique latine tente de équilibrer le débat international, historiquement dominé par les États-Unis et la Chine, en plaçant la protection des individus au cœur du débat.
Le pari est ambitieux : assurer que les droits comme la vie privée, l’égalité, l’accès à Internet ou la non-discrimination soient respectés avec la même efficacité dans le monde numérique que dans le monde physique.
Questions fréquentes (FAQs)
Qu’est-ce que les droits numériques ?
Ce sont l’extension des droits fondamentaux (vie privée, liberté d’expression, égalité, etc.) dans l’environnement digital, garantissant leur respect sur Internet et face aux nouvelles technologies.
Qu’est-ce que l’Observatoire des Droits Numériques ?
Une initiative espagnole public-privée visant à diffuser, protéger et mettre en œuvre les droits numériques, avec une vocation internationale, notamment en Amérique latine.
Pourquoi l’Espagne souhaite-t-elle diriger cette démarche ?
Pionnière avec sa Charte des Droits Numériques (2021), l’Espagne veut consolider une vision humaniste et durable de la transformation digitale, en collaboration avec l’Europe et l’Amérique latine.
Quel rôle joue l’intelligence artificielle dans ce débat ?
L’IA soulève des enjeux en matière de vie privée, d’éthique et de contrôle des données. L’alliance ibéro-américaine cherche à assurer que son utilisation soit alignée avec les valeurs démocratiques et les droits fondamentaux.
📌 Sources : Ministère de la Transformation Numérique et de la Fonction Publique (Gouvernement d’Espagne), Red.es, Charte des Droits Numériques (2021), Déclaration des droits numériques de l’UE (2022), Charte ibéro-américaine des droits numériques (2023).