La transformation numérique en Europe a franchi une étape décisive avec GAIA-X, une initiative visant à créer une infrastructure de données souveraine, ouverte et sécurisée pour l’ensemble de l’économie continentale. Lors du Automatica 2025, cette vision prend de l’importance, positionnant GAIA-X comme l’une des pierres angulaires du futur numérique industriel en Europe.
Qu’est-ce que GAIA-X et pourquoi est-il crucial pour l’industrie européenne ?
Porté par les ministères fédéraux de l’Économie et de la Recherche en Allemagne, avec un soutien fort de la France et de la Commission européenne, GAIA-X répond à la dépendance croissante vis-à-vis des grandes plateformes cloud américaines — telles qu’Amazon Web Services, Microsoft Azure ou Google Cloud. L’objectif : offrir une alternative européenne alliant interopérabilité, confiance, sécurité et souveraineté numérique.
Pour Peter Altmaier, ancien ministre de l’Économie, « les données seront la ressource la plus importante de demain ». Dans ce contexte, l’Europe nécessite une infrastructure numérique permettant de contrôler l’accès, l’utilisation et le partage des données industrielles, sans dépendre d’acteurs externes.
Un cloud industriel ouvert, avec des normes européennes
GAIA-X ne vise pas à concurrencer directement les géants du cloud, mais à offrir aux entreprises — en particulier aux PME — une alternative garantissant que les données restent sous contrôle européen, sans barrières technologiques ni conditions opaques. L’architecture est conçue pour être modulaire, distribuée et basée sur des normes ouvertes, facilitant la connexion de services cloud, edge et sur site, dans un cadre commun.
Ce nouvel écosystème permettra, par exemple, le partage sécurisé de données industrielles entre entreprises pour des applications telles que la maintenance prédictive, la traçabilité, le design collaboratif ou la simulation dans des environnements comme le Métavers Industriel. Il n’est pas surprenant que des géants tels que SAP, Siemens, Bosch, BMW, Schunk, Telekom ou Festo soient déjà impliqués dans son développement.
Quelle est l’opinion des géants technologiques ?
Plutôt que d’exclure, les promoteurs de GAIA-X ont invité des acteurs mondiaux tels que Microsoft, Google, Amazon ou IBM à participer, tant qu’ils respectent les principes de souveraineté des données et de transparence. Sabine Bendiek, PDG de Microsoft Allemagne, a déclaré que « le concept de GAIA-X contient de nombreuses idées judicieuses » et qu’il est essentiel pour permettre l’intelligence artificielle dans des secteurs comme la santé ou l’administration publique.
Applications pratiques et décentralisation
Un des premiers cas d’utilisation proposés par le consortium est le “Collaborative Condition Monitoring”, qui permettra une surveillance continue des équipements industriels entre différents fabricants. Cette approche d’interopérabilité en temps réel est un pas nécessaire vers des modèles avancés de maintenance prédictive et de gestion énergétique dans des usines intelligentes.
Parallèlement, des entreprises comme Rittal déploient déjà des infrastructures décentralisées, comme des micro-centres de données dans des usines traitant sur place jusqu’à 18 téraoctets par jour, évitant ainsi d’envoyer toutes les informations vers le cloud public. Cette combinaison de edge computing et de cloud souverain est essentielle pour le succès de GAIA-X.
Le précédent : International Data Spaces
Ce projet ne part pas de zéro. Depuis 2014, le projet de recherche IDS (International Data Spaces), dirigé par l’institut Fraunhofer, a travaillé à la création d’espaces de données sécurisés pour des secteurs tels que la médecine et la recherche de matériaux. Cette expérience a été essentielle dans la conception technique de GAIA-X, avec plus de 100 organisations européennes déjà impliquées.
L’Europe mise sur la souveraineté numérique avec une vision industrielle
Selon les mots du Dr Frank Melzer, CTO de Festo et coordonnateur du comité de direction de la plateforme Industrie 4.0 :
« La confiance numérique est un facteur essentiel pour la transformation de l’industrie. Avec GAIA-X, nous pouvons garantir que chaque entreprise ait le contrôle total de ses données, sans renoncer à la collaboration ni à l’innovation. »
GAIA-X représente bien plus qu’un cloud européen. C’est un projet de souveraineté technologique au cœur du processus de digitalisation de l’industrie. Connecté à des technologies comme le Métavers Industriel, l’intelligence artificielle et l’automatisation intelligente, cette infrastructure a le potentiel de démocratiser l’accès à des outils avancés pour les PME européennes.
Que se passera-t-il ensuite ?
Au cours de la seconde moitié de 2025, on s’attend à ce que des tests pilotes en environnements réels soient intensifiés, avec validation de cas industriels en Allemagne et en France. Parallèlement, de nouveaux participants continueront à être intégrés, avec une attention particulière aux entreprises de taille intermédiaire et petite, qui pourront accéder à des solutions d’IA en tant que service, à un stockage sécurisé et à une informatique collaborative, tout en gardant le contrôle de leurs données.
GAIA-X n’est pas seulement un cloud, mais un manifeste européen pour récupérer le contrôle sur l’actif le plus précieux du XXIe siècle : l’information. Et lors de l’événement Automatica 2025, cet avenir commence à prendre forme.
source : Automatica