La révolution de l’intelligence artificielle transforme non seulement le secteur technologique, mais aussi notre façon de consommer l’énergie. L’essor de l’IA générative et du calcul haute performance (HPC) pousse les centres de données à leurs limites électriques. Face à cette situation, Equinix, l’un des plus grands opérateurs mondiaux d’interconnexion et de centres de données, entreprend une démarche innovante en misant actuellement sur des piles à combustible et à l’avenir sur l’énergie nucléaire de nouvelle génération pour répondre à la demande croissante.
Selon les prévisions du Department of Energy des États-Unis, la consommation électrique des centres de données pourrait passer de 4,4 % de la production nationale en 2023 à entre 6,7 % et 12 % en 2028. Ce saut est principalement dû à l’explosion de l’IA, qui requiert des capacités de calcul en temps réel extrêmement importantes.
Aujourd’hui, un seul rack de GPU pour l’IA peut dépasser les 100 kW, et des projets de prochaine génération, tels que les clusters NVIDIA Rubin, s’approchent du demi-mégawatt par rack. Cela constitue un défi considérable non seulement pour les géants de la technologie, mais aussi pour le réseau électrique local, souvent déjà sous tension.
En réponse, Equinix a élaboré une stratégie double :
– Utiliser des solutions immédiates avec les piles à combustible Bloom Energy, qui exploitent 75 MW dans 19 centres IBX à travers six états américains, avec 30 MW supplémentaires en construction. Ces piles offrent une électricité locale plus propre et plus stable, réduisant la dépendance au réseau traditionnel.
– Investir à long terme dans l’énergie nucléaire de nouvelle génération. En 2024, l’entreprise a conclu un accord avec Oklo pour 500 MW de capacité nucléaire via des réacteurs rapides recyclant les déchets nucléaires. Par ailleurs, des partenariats avec Radiant, ULC-Energy et Stellaria annoncent l’achat potentiel de microréacteurs modulaires, de petits réacteurs à sel fondu capables de fabriquer leur propre combustible et de traiter les déchets nucléaires.
Ce modèle hybride permet à Equinix d’assurer une fourniture électrique fiable immédiatement, tout en préparant l’avenir avec des solutions nucléaires avancées. Raouf Abdel, vice-président exécutif des opérations globales, résume cette approche : « L’accès à une électricité continue est essentiel pour tout, de la recherche pharmaceutique à la diffusion vidéo en streaming. Nous devons investir dans des infrastructures énergétiques fiables, durables et évolutives. »
Au-delà de leurs bénéfices pour leurs clients, ces initiatives auront un impact positif sur les communautés locales, en renforçant les réseaux électriques, en créant des emplois dans la construction et la maintenance, et en soutenant des technologies réduisant les émissions et les déchets.
De plus, Equinix n’est pas seul à explorer cette voie. Des géants comme Google, Amazon et Microsoft investissent aussi dans la filière nucléaire. Google collabore avec Kairos Power pour développer des réacteurs SMR en Tennessee, Amazon prévoit 5 GW d’énergie nucléaire via des partenariats, et Microsoft explore les réacteurs de fission et d’énergie de fusion pour ses campus d’IA.
Toutefois, ces projets soulèvent aussi des questions : la régulation, l’acceptation sociale, et la difficulté technique d’intégrer ces réacteurs modulaires aux centres de données. La tendance est claire : la croissance de l’IA ne peut plus se limiter aux énergies renouvelables et au gaz, mais doit s’appuyer sur un mix énergétique diversifié et innovant.
En résumé, Equinix trace une voie pionnière en combinant piles à combustible et nucléaire de prochaine génération, assurant non seulement la demande immédiate mais aussi l’avenir de la haute performance informatique. Dans un monde où les centres de données deviennent les usines du savoir, l’énergie devient le nouveau “or numérique”, avec Equinix prêt à jouer un rôle de leader dans cette course à l’atome digital.