La récupération après sinistre est passée d’un manuel rangé dans un tiroir à un service opérationnel testé, audité et payé à l’usage. Disaster Recovery as a Service (DRaaS) permet de reproduire en temps réel (ou presque) des charges critiques, de définir des objectifs de récupération (RTO/RPO) vérifiables, et d’effectuer un failover sans interrompre la production. Quatre secteurs — finance, énergie, santé et SaaS — illustrent pourquoi la reprise n’est plus une option mais une obligation de continuité.
Ce rapport passe en revue les exigences réglementaires, des cas réels et les bonnes pratiques par industrie, et conclut par une proposition technique depuis la perspective de Stackscale (groupe Aire) pour déployer un DRaaS fiable en Espagne et en Europe.
Finance : continuité certifiée et audits exigeant agilité et précision
Les établissements financiers gèrent des systèmes bancaires centraux, des paiements instantanés, des guichets automatiques et des canaux numériques avec des objectifs de disponibilité irréprochables. Des cadres comme les Directives de l’EBA sur la gestion des risques ICT et de sécurité, Basil III ou les guides de la BCE imposent de démontrer une capacité de récupération avec des RTO/RPO auditables.
Ce qu’implique un DRaaS « prêt pour l’audit » dans la banque :
- Réplique synchrone à basse latence pour les paiements et la compensation; asynchrone pour le back-office avec une tolérance accrue à la perte de données.
- Tests réguliers de failover (au moins trimestriels) avec rapports automatiques et une traçabilité de qui, quand et comment.
- Segmentation par criticité : quelques minutes pour les paiements, rubans plus larges pour les systèmes internes.
- Scénarios d’attaque cybernétique avec des espaces isolés (air-gapped ou logiquement segmentés) pour maintenir les services essentiels tout en contenent l’incident.
Leçon apprise | TARGET2 (BCE, 2020). La panne quasi de dix heures de la plateforme interbancaire a révélé que, même en ayant un plan de contingence, il ne suffit pas de pouvoir l’exécuter à temps. L’automatisation du failover, l’orchestration et la communication de crise sont aussi critiques que la réplication.
Énergie : résilience des systèmes ICS/SCADA et réseaux infaillibles
Les opérateurs électriques et gaziers travaillent avec des systèmes industriels (ICS/SCADA, DCS) où chaque seconde compte. L’indisponibilité impacte la fourniture, la stabilité du réseau et la sécurité physique, dans le respect de cadres comme ISO 22301 ou les directives européennes concernant les infrastructures critiques.
Ce que le DRaaS apporte dans le secteur de l’énergie :
- Tests de récupération planifiés sans interrompre l’activité, validés contre des incidents physiques et logiques.
- Répliques en temps réel de SCADA/DCS, avec un basculement vers un site alternatif en cas de défaillance du centre principal.
- Continuité dans des environnements distribués avec stations distantes et liens sensibles : compression et deduplication évitant la saturation des lignes.
- Telemétrie et audit pour assurer la conformité et identifier les goulots d’étranglement en amont des incidents.
Risque systémique | Panne majeure en péninsule Ibérique (2025). Une coupure généralisée d’électricité paralyse transport, télécommunications et services d’urgence, avec des effets en cascade. La capacité de failover en temps réel et l’existence d’un site alternatif sont essentielles pour différencier une incident maîtrisé d’une crise nationale.
Santé et pharmaceutique : disponibilité et confidentialité sans compromis
Les hôpitaux, laboratoires et industries pharmaceutiques gèrent des données de santé et de propriété intellectuelle. En plus d’être toujours disponibles, ces systèmes doivent protéger les données et tracer qui y accède ou les restaure.
Ce que garantit un DRaaS dans ce secteur :
- RTO/RPO différenciés : urgences et HIS en quelques minutes; répertoires de recherche avec un accent sur l’intégrité.
- Réplikation continue des bases cliniques et conmutations immédiates en cas de défaillance ou ransomware.
- Rapports d’essais et audits exhaustifs pour la conformité GDPR/HIPAA, démontrant la possibilité de récupération, le délai et jusqu’où (RPO).
- Intégration hybride : applications legacy et plateformes cloud sans trahir la chaîne de conservation.
Cas réel | Dedalus (France, 2022). Une fuite de données ayant touché des centaines de milliers de patients a conduit à une amende de 1,5 million d’euros et à une refonte des contrôles, réplication et tracabilité. La disponibilité sans sécurité n’est pas suffisante.
SaaS et plateformes numériques : SLAs gagnés par la reprise
Les fournisseurs SaaS combinent microservices, CI/CD et multicloud. Leurs SLAs reposent sur leur capacité à revenir rapidement en ligne après une défaillance de code, une dépendance externe ou une panne de plateforme.
Ce que le DRaaS résout dans SaaS :
- Politiques RTO/RPO par microservice (par exemple, authentification et paiements) avec des objectifs plus ambitieux.
- Tests de récupération intégrés dans le pipeline CI/CD, sans interrompre les déploiements.
- Protection évolutive parallèlement à la croissance des utilisateurs.
- Scénarios de ransomware avec basculement isolé pour limiter la propagation en environnement multi-locataires.
Dependances critiques | CrowdStrike (juillet 2024). Une mise à jour défectueuse a mis en panne des millions d’équipements Windows et affecté les chaînes SaaS. Le souci a rappelé que plan de rollback, environnements de secours et tests réguliers de récupération ne sont pas de simples « extras » mais font partie intégrante de l’accord de niveau de service (SLA).
Quand “le cloud” repose sur un seul centre de données : le cas de la Corée du Sud
Un incendie au centre NIRS (Daejeon, Corée du Sud) détruit des systèmes gouvernementaux et un stockage surnommé “G-Drive” sans copies de sauvegarde. Résultat : des cents de milliers de fichiers de fonctionnaires perdus et des services critiques interrompus. La leçon est claire : sans réplication géographique et without tests de restauration, le cloud n’est pas véritablement fiable, c’est juste un centre de traitement de données avec un marketing sophistiqué.
Comment implémenter un DRaaS fiable : l’approche de Stackscale
Plus que le catalogue, un DRaaS solide repose sur la conception, les tests et les métriques. Selon Stackscale, les piliers du succès sont :
- Architecture active-active pour les charges critiques
- Stockage synchrone entre deux centres de données indépendants avec RTO = 0 et RPO = 0 pour les volumes désignés.
- Basculement transparent au niveau du bloc et orchestration des services dépendants (BD, files d’attente, identité).
- Troisième lieu pour copies immuables
- Sauvegarde immuable (WORM) dans un autre centre de données avec politiques 3-2-1 et retention réglementaire.
- Récupération dans un environnement isolé pour enquête forensic et nettoyage avant de réintroduire en production.
- Compatibilité des plateformes
- Hyperviseurs et stacks courants (KVM/Proxmox, VMware, conteneurs/K8s) et cloud hybride si nécessaire.
- Réplique au niveau de VM, volume ou application (journaling, log-shipping, CDC).
- Tests et preuves
- Simulations au moins trimestriellement avec KPIs (temps de basculement, cohérence, erreurs) et preuves signées pour audit.
- Runbooks versionnés : étapes de récupération, dépendances, validations métier.
- Gouvernance et sécurité
- Segmentation réseau et comptes, MFA, accès just-in-time et journal inaltérable.
- Monitoring de la latence et du bande passante de réplication, alertes en cas de dérive RPO.
Les métriques clés (à définir contractuellement) :
- Objectif RTO par service (en minutes).
- Objectif RPO par type de données (en secondes/minutes/heures).
- Taux de succès des tests de récupération et temps moyen de basculement.
- Fréquence des exercices et portée (partielle vs totale).
- SOV (Séparation des fonctions) et traçabilité dans les accès d’urgence.
Guide rapide de déploiement par secteur
- Finance : privilégier synchronisé pour paiements; asynchrone pour risque/crédit>; drills trimestriels audités.
- Énergie : site alternatif avec liens redondants; tests sans arrêt; réplication optimisée pour liens distants.
- Santé/pharma : immuabilité + traçabilité; RTO minutes pour HIS / urgences>; chaîne de conservation vérifiable.
- SaaS : micro-RTO par service; rollback intégré dans CI/CD; isolement en réponse au ransomware.
Le coût de ne pas pratiquer
Les incidents évoqués — TARGET2, pannes, fuites massives ou échecs de mise à jour — confirment que le risque opérationnel n’est pas hypothétique. Le DRaaS constitue le lien entre architecture, procédures et preuves. Il est essentiel d’ajuster les RTO/RPO à la réalité, de simuler la récupération et de mesurer les résultats *avant* le prochain incident.
Questions fréquentes
En quoi le DRaaS diffère-t-il d’une sauvegarde traditionnelle pour la continuité d’activité ?
La sauvegarde protège les données, tandis que le DRaaS sécurise les services. Il inclut la réplication continue, l’orchestration d’applications, le basculement vers un site alternatif et des tests réguliers avec preuves des RTO/RPO. Il permet de continuer à fonctionner pendant la résolution de l’incident.
Comment choisir entre une réplication synchrone ou asynchrone pour un DRaaS ?
La réplique synchrone offre un RPO = 0 mais nécessite de hautes performances de latence et des liaisons dédiées; elle est idéale pour les paiements et les transactions. La réplique asynchrone tolère la latence et la distance, avec des RPO de secondes ou minutes, et convient aux back-office, analytique ou charges moins sensibles.
À quelle fréquence tester un plan DRaaS ?
Au minimum trimestriellement, avec des exercices simulant des défaillances réalistes (panne de centre, corruption de donnée, cyberattaque). Chaque test doit mesurer le RTO/RPO, recueillir des preuves et mettre à jour les runbooks. Dans les secteurs réglementés, ces rapports font partie de la conformité.
Quelle architecture privilégier pour les charges critiques ?
Pour des données hautement transactionnelles, un stockage actif-actif avec réplication synchrone entre deux centres, avec RTO = 0 et RPO = 0. Complété par des copies immuables dans un troisième site, orchestré et vérifié par des tests réguliers et auditables.