7 vulnérabilités critiques sur les serveurs Linux en 2025 : risques réels et conseils d’un expert en cloud

Guide complet pour améliorer la sécurité sous Linux

Dans un paysage de plus en plus automatisé, exposé et multi-cloud, la sécurité des serveurs Linux en 2025 traverse une étape cruciale. La pression exercée sur les équipes systèmes et sécurité s’est intensifiée face à la prolifération d’exploits sophistiqués et à l’abus constant de vulnérabilités connues. Cette réalité concerne également l’infrastructure cloud et bare-metal.

David Carrero, cofondateur de Stackscale (Groupe Aire) et expert en plateformes critiques, met en garde : « Il ne suffit plus d’appliquer des correctifs. Il faut repenser la conception de l’architecture de sécurité dès le départ, du firmware aux couches applicatives. »

Voici un aperçu technique des sept vulnérabilités les plus critiques affectant les serveurs Linux en cette année 2025.

Une chaîne d’attaque combinée permet à un utilisateur SSH sans privilèges de devenir root en exploitant le module pam_env et le démon udisks2. Cela concerne SUSE, Ubuntu, Debian, Fedora et AlmaLinux.

Séquence de l’attaque :

  1. L’utilisateur SSH manipule des variables comme XDG_SEAT.
  2. PAM lui attribue le statut « allow_active ».
  3. Udisks2 permet de monter une image XFS avec un binaire SUID-root.
  4. L’attaquant exécute un shell avec privilèges root.

Mesures immédiates :

  • Appliquer les correctifs publiés en juin 2025.
  • Modifier Polkit (auth_admin au lieu de allow_active).
  • Désactiver user_readenv dans SSHD.
  • Auditer les journaux pour toute activité suspecte.

Selon David Carrero : « La gravité de ce vecteur réside dans sa simplicité d’exploitation ; il ne nécessite pas de code complexe, juste une mauvaise configuration. C’est le type de faille qui met en danger des environnements critiques avec un accès SSH exposé. »


Plusieurs vulnérabilités, présentes depuis différentes versions d’OpenSSH, permettent d’intercepter des connexions SSH et de provoquer des dénis de service. Deux failles majeures, CVE‑2025‑26465 et CVE‑2025‑26466, permettent respectivement une attaque man-in-the-middle avec clés frauduleuses et un empilement de paquets malveillants susceptibles de faire tomber des sessions légitimes.

Solution : mettre à jour vers OpenSSH 9.9p2 ou supérieur. Il est également conseillé d’activer StrictHostKeyChecking, désactiver les algorithmes peu sûrs comme SHA-1 ou CBC, et limiter l’accès avec AllowUsers.

Pour Carrero, « SSH reste la porte d’entrée principale dans les environnements Linux. Sans audit et restriction, les attaquants peuvent exploiter ces failles pour prendre le contrôle des sessions en production. »


Des problèmes de synchronisation dans le noyau Linux, identifiés dans les versions 5.15.0-90 et antérieures, notamment sur Ubuntu 20.04 et 22.04, peuvent entraîner des conditions de course menant à une escalade de privilèges ou un déni de service.

Les environnements concernés comprennent Ubuntu, Debian, RHEL, Fedora et autres distributions avec un noyau supporté à long terme. La solution consiste à installer les versions corrigées, à activer les options de renforcement du noyau telles que KASLR et CONFIG_DEBUG_RODATA, et à utiliser des outils comme AIDE pour auditer l’intégrité du système.


Une nouvelle forme d’attaque spéculative, Spectre-v2 “Training Solo”, exploite des failles dans les microcodes de processeurs modernes, notamment ceux d’Intel et ARM. Ces vulnérabilités, CVE‑2024‑28956 et CVE‑2025‑24495, contournent les mitigations classiques comme IBPB et eIBRS, permettant la fuite de mémoire du noyau depuis des processus utilisateur.

Les risques concernent principalement les processeurs Intel Tiger Lake, Ice Lake, Xeon 2e-3e génération, ainsi que certains CPU ARM. La mitigation passe par la mise à jour des microcodes (à partir de mai 2025), l’installation de noyaux supportant IBHF, et la mise en place d’un isolement strict en environnement multi-tenant dans le cloud.

Carrero indique : « Ces attaques montrent que l’isolement matériel n’est plus suffisant. La sécurité doit s’adopter en couches, incluant microcodes, virtualisation sécurisée et segmentation. »


Les vulnérabilités SSRF (Server-Side Request Forgery) dans les APIs internes cloud permettent à des attaquants d’accéder à des métadonnées et configurations internes en manipulant les requêtes web ou API, affectant notamment AWS, Azure et GCP. La technique consiste souvent à masquer les adresses IP par des méthodes d’offuscation, du rebinding DNS ou en exploitant des failles LFI ou XXE.

Les mesures préventives incluent le blocage des plages internes via proxy ou firewall, la validation stricte des URLs par listes blanches, la limitation des redirections, la surveillance avec des outils comme ssrfmap ou Burp.


En 2025, une augmentation des attaques exploitant des conteneurs mal configurés a été observée. Même si aucun CVE précis ne leur est associé, les configurations erronées telles que l’utilisation de conteneurs privilégiés, l’absence de restrictions ou l’utilisation de volumes avec des binaires SUID facilitent la montée en privilèges, l’accès aux sockets Docker ou Kubernetes, ou encore la manipulation d’images compromis.

Il est recommandé d’éviter l’usage de conteneurs privilégiés en production, d’activer AppArmor ou seccomp, de ne pas exposer les démons Docker/Kubelet sans TLS, et de surveiller l’accès à /proc, /sys et les dispositifs virtuels.

Carrero souligne : « Dans le cloud ou en bare-metal, la conteneurisation doit s’accompagner de politiques strictes et de contrôles rigoureux. Les outils existent, mais peu prennent au sérieux la sécurité au niveau du runtime. »


Enfin, en 2025, plusieurs incidents liés à des dépôts compromis ou obsolètes ont été signalés. L’utilisation de dépôts tiers non signés, l’installation automatisée de paquets sans vérification GPG, ou encore des images infectées dans Snap, Flatpak ou OCI, constituent une menace.

Il est essentiel de s’appuyer uniquement sur des dépôts officiels signés, d’activer la validation GPG, d’isoler les environnements de test et de production, et de surveiller les modifications inattendues avec des outils comme Tripwire.


En conclusion, ces vulnérabilités illustrent que la surface d’attaque s’est élargie du noyau jusqu’aux couches les plus externes telles que APIs, conteneurs et dépôts. La réponse doit s’appuyer sur des approches techniques mais également stratégiques. Selon Carrero : « La clé n’est pas seulement dans les patchs, mais dans la visibilité. La gestion de la configuration, l’observabilité et le hardening doivent être intégrés dès la conception. C’est cette approche qui distingue un système résilient d’un système exposé. »

Dans un monde où la disponibilité et la confiance sont des différenciateurs clés, connaître et atténuer ces sept vulnérabilités critiques peut faire la différence entre la continuité opérationnelle et une crise de sécurité majeure.

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